Ilyf, concert-spectacle à voir en famille

La compagnie Le pli de la voix met en jeu une nouvelle création, voyage à la recherche d’une île où le sacré pourrait côtoyer des rêves en demi-teintes. 

Une forêt d’instruments, symbolisant la présence de la nature, occupe le centre d’une scène en clair-obscur : ocarina, tambours, kamele n’goni proche de la kora…Un musicien se déplace, se pose pour jouer d’un instrument, déambule à nouveau dans l’espace en chantant une mélopée sans paroles, avant de saisir à nouveau un autre instrument ; l’un après l’autre, des tableaux se créent…

Peau, bois, calebasse, terre, cordes ou encore voix sont reliés à un dispositif électronique qui permet de créer des boucles sonores. Le musicien frotte, frappe, gratte, caresse, faisant naître des sonorités parfois mélodiques, souvent purement sensorielles et polyphoniques. 

Au fond de la scène, un graphisme imaginé par le plasticien Sylvain Gaudenzi : une circonférence floue, mêlant les significations au gré de l’imaginaire du spectateur : la terre, un vortex, une île… 

MISE EN JEU

Le spectacle Ilyf, est « un voyage musical à la recherche d’une île, qui invoque à la fois le sacré et le ludique », nous explique Alain Paulo son créateur. Il est né des ateliers intitulés « Parcours sonores et musicaux » que le musicien propose régulièrement à l’Oasis des familles¹ à Montreuil, durant lesquels les enfants explorent matières et sonorités, en manipulant les instruments déployés par l’artiste. Cette expérience, ainsi qu’un atelier au théâtre du Lierre autour des premiers rituels de l’humanité, ont permis à Alain Paulo de donner forme à une inspiration issue d’une lecture de l’auteur nigérian Ben Okri, dans son livre Étonner les dieux, et d’un rêve, celui d’un pays, le Nigéria, où il n’est encore jamais allé.  Le nom d’Ilyf vient d’ailleurs du nom d’une cité du peuple Yoruba, qui aurait vu naître le berceau de l’humanité, selon la croyance. « Je ne vais pas produire dans ce spectacle des musiques ethnographiques, je ne suis pas spécialiste, mais j’en fais une ré-interprétation. Ce que je joue, c’est plutôt l’expression d’un imaginaire culturel, qui est allé se saisir de manière intuitive des autres cultures musicales que je connais. C’est le désir de jouer de tous ces instruments qui est venu à la rencontre de ce qui sommeillait en moi. » 

MISE EN FORMES

Alain Paulo a grandi dans une famille de musiciens amateurs où la musique est présente à chaque occasion de la vie : il apprend la guitare, joue dans les bals, passe par le conservatoire, devient animateur, pratique la méthode Willems et manifeste très vite l’envie de partager avec les enfants son amour profond de la musique et le bien-être qu’elle procure, sans doute en écho à celui qu’il a connu dans son enfance. Pendant son service militaire, qu’il fait en tant qu’objecteur de conscience, il sillonne musicalement des crèches et expérimente sur le terrain des manières de s’adresser aux plus petits. En 2005, il crée sa compagnie, Le pli de la voix, composée d’un collectif de d’artistes venant d’horizons divers et de professionnels de l’enfance. « Avec le jeune public, les écoutes sont palpables, en particulier pour celui qui présente un spectacle. Dans cette dernière création, il me semble que des moments plus profonds et d’autres plus légers se côtoient ». 

La représentation peut être précédée ou suivie d’une rencontre qui permet de vivre de façon active la matière du spectacle. Riche des émotions partagées, l’enfant accompagné par son parent abordera cette expérience inédite qu’est le spectacle vivant dans une dimension qui lui est en partie familière. Comme des échos qui viendront valider ce vécu tout en lui offrant de nouveaux imaginaires…

• Dominique Boutel