Un atelier lecture avec les bébés

Au sein d’un café littéraire, installé dans le 18^e arrondissement de Paris, Le Poussiney accueille les familles, les bébés et les assistantes maternelles pour des bains de lecture.

Le Poussiney, un nom joliment trouvé pour désigner le lieu qui, au Petit Ney, à la Porte Montmartre à Paris, accueille la petite enfance. Le Petit Ney est devenu, depuis sa création en 1994, une institution de ce quartier en bordure du 18^e arrondissement, composé d’immeubles HLM, coincé entre le boulevard extérieur des Maréchaux et le périphérique. Au départ, animé par un collectif d’habitants qui lancent un journal, ce lieu associatif s’est rapidement transformé en un café littéraire initiant de nombreuses manifestations culturelles, des ateliers et une restauration éco-responsable, avec l’objectif de favoriser la rencontre des habitants, petits et grands, autour des questions qui agitent le monde, dans cette zone délaissée par les institutions culturelles.

UN CAFÉ LITTERAIRE POUR TOUS

Le Café littéraire est un lieu convivial offrant des activités où peuvent se retrouver les familles. Sa programmation culturelle est reconnue dans un périmètre plus large, Paris et sa banlieue. Ouvert en journée, il propose une restauration tous les midis et des soirées-débat régulières autour du commerce équitable et du développement durable. 

Créé et géré par des habitants du quartier de manière entièrement bénévole, l’action est passée au salariat ; l’association emploie aujourd’hui sept personnes. 

2012 voit la naissance du Poussiney, un nouvel espace dédié aux enfants avec leurs parents. « La lecture aux bébés », raconte Martine Pascual, programmatrice culturelle du Petit Ney, « c’est parti de Raymonde, une adhérente. Au début, on allait chercher les femmes du quartier qui passaient avec leurs poussettes dans la rue. Puis des habitudes se sont installées, petit à petit ». Des structures comme l’ARPLE (Association de Recherche et de Pratique sur le Livre pour Enfant) ou l’Agence quand les livres relient, ont permis la constitution d’une bibliothèque, de formations spécifiques, de séminaires et d’évènements autour des livres et de l’enfance.

En semaine, l’atelier accueille les assistantes maternelles inscrites à l’année par les parents, à raison de deux matinées le mardi et le vendredi. Un samedi par mois, le matin ou l’après-midi en fonction des dates, les parents viennent avec les enfants à l’atelier.

UN BAIN DE LIVRES

Mardi 10h, défilé de poussettes : en tout, 9 « bébés » et 6 assistantes maternelles se retrouvent dans la salle. Tout le monde a l’air de connaître le rituel : sur les petites chaises ou par terre, les enfants et les adultes s’installent peu à peu en cercle autour de l’animatrice. Aujourd’hui c’est Marianne, qui, à 10h30, lance l’atelier avec son bâton de pluie. Puis c’est une souris, non pas verte mais bleue, qui sort d’une boite à malice et accueille les petits individuellement. Chaque enfant reçoit une carte illustrée qui est un prétexte à chansons : un escargot, un pouce, un cœur… permettent d’entonner les comptines traditionnelles ou non, que tout le monde semble connaître, adultes comme enfants. La participation est collective, joyeuse ; un lien se construit peu à peu entre chansons, formulettes et récits. Puis vient le moment de l’histoire, ou plutôt des histoires, auxquelles les plus jeunes, à peine un an, prêtent une oreille très attentive. Enfin, le « bain de livres » laisse la possibilité à chacun de feuilleter les albums rangés dans une caisse ou de demander qu’on lui raconte une histoire « de plus ». Les plus grands partagent avec les plus petits qui feuillettent eux-mêmes avec beaucoup de soin leur album, certains à l’envers, mais qu’importe ! 

« Le format des ateliers est ritualisé », explique Marianne, « cela crée des repères, pour une habitude de la lecture ». Les animatrices interviennent aussi dans les crèches et jardins d’enfants alentour. Elles proposent également une manifestation annuelle hors les murs, L’album fleurit le bitume, en lien avec la librairie L’éternel retour, les centres de loisirs du quartier et la bibliothèque Jacqueline de Romilly nouvellement rafraichie ; les assistantes maternelles ont pris l’habitude d’y aller régulièrement se fournir en histoires à raconter en dehors de l’atelier.

• Dominique Boutel