La formation dans un lieu d’accueil

Élaborés à la demande, les temps de formation in situ proposés par Enfance et Musique se glissent dans la vie du lieu. Ils alternent des temps de partage entre adultes et les temps en présence des enfants. Un subtil équilibre à mettre en œuvre.

Le temps de la formation continue est un moment privilégié, une parenthèse consacrée au perfectionnement et aux découvertes, un espace de confrontation des pratiques, un enrichissement personnel sur une thématique choisie. Mais dans cette période de fonctionnement tendu des lieux d’accueil du très jeune enfant, les départs en formation ne sont parfois pas possibles. Inclure la formation dans le lieu de travail peut être plus souple ; ce dispositif de formation professionnelle s’inscrit alors dans le quotidien des enfants et des professionnels et permet d’être au plus près de leur réalité et de leurs besoins.

LA POSTURE DU FORMATEUR

La présence d’un artiste-formateur dans un lieu d’accueil permet d’extraire les professionnels d’une forme de routine de fonctionnement. Avec des temps entre adultes et des moments en présence des enfants, rien ne s’improvise. « Une demi-journée de préparation s’avère nécessaire pour tous » souligne Alain Paulo, formateur et musicien, qui intervient dans ce contexte depuis une vingtaine d’années. Les premiers échanges concernant la mise en place de stage in situ se font en premier lieu avec la direction qui généralement a commandé cette formation. Il est ensuite essentiel d’associer l’ensemble de l’équipe durant le temps de préparation pour clarifier les enjeux de ce temps de formation. Ce stage s’inscrit-il dans un projet d’établissement (ce qui peut engendrer des attentes très précises) ou est-il souhaité parce qu’il va permettre avant tout de remobiliser l’équipe autour d’une nouvelle pratique ?  Ce temps de mise en commun est fondamental pour installer les bonnes conditions de réalisation de cette formation in situ.  Pour déjouer une certaine méfiance des professionnels, il est nécessaire de ne pas tomber dans la surenchère de propositions mais de réfléchir au sens global de notre présence, d’accepter certains écueils et de ne pas croire que l’on va tout transformer ». Un intervenant extérieur peut déstabiliser certaines pratiques et susciter des réactions « je ne fais pas ça d’habitude » ! Le programme pédagogique et la durée sont alors bien définis en fonction des objectifs, besoins et possibilités organisationnelles afin de ne pas transformer la présence du formateur en succession de temps d’animation. La place de chacun se définit avec soin, en fonction de la disponibilité des équipes.

Parmi ses objectifs, la formation in situ travaille sur la manière de s’appuyer sur les propositions des enfants. Les ateliers et les moments de partage avec les très jeunes enfants sont d’abord encadrés par le formateur qui passe progressivement la main à l’équipe.

OBSERVER ET METTRE EN PRATIQUE

Alain Paulo reprend souvent cet exemple : « Il peut arriver durant des temps d’éveil à la musique que les enfants courent, s’arrêtent, repartent de plus belle. L’instinct premier de l’adulte pourrait être “Puisque ça ne vous intéresse pas, on range“. Le formateur musicien va permettre de décaler le regard du professionnel. En accompagnant la course de l’enfant, en la ponctuant d’un environnement sonore alternant musique et silence, ce temps d’éveil musical prend une autre forme, celle d’une rencontre et d’un échange ». Il n’est pas obligatoire d’attendre quelque chose de l’enfant mais plutôt de l’observer, de prendre en compte ses désirs et d’ajuster artistiquement notre proposition ». En s’adaptant au rythme de la structure, la formation organisée dans un lieu d’accueil alterne des temps en présence des enfants et des temps entre adultes. Les débriefings sont assez courts car la vie de la crèche ne s’arrête pas mais directement en prise avec des situations vécues par tous. Les stagiaires observent, analysent et mènent des propositions artistiques vécues concrètement par les enfants. La présence d’un formateur dans un lieu d’accueil ne remplace pas le temps personnel vécu dans un stage, loin du lieu professionnel. Les deux configurations restent complémentaires, permettant pour l’une de faire avancer un projet d’équipe, pour l’autre une pratique à réinvestir au quotidien. Dans un contexte difficile, fait de contraintes budgétaires et d’incertitudes globales, la formation à l’éveil artistique et culturel incite les adultes à remettre l’enfant au centre et à s’engager dans un projet pour l’enfance, nourri de nouvelles compétences.