Annie Avenel, responsable du centre de formation d’Enfance et Musique et Geneviève Schneider, musicienne et responsable pédagogique, évoquent le partenariat engagé auprès des professionnels de l’enfance.
Afin d’être à l’écoute des assistantes maternelles et de créer un climat de confiance la CAF du Val-d’Oise a procédé à un vaste recensement des besoins de professionnalisation. Un certain nombre de préconisations ont été rédigées par les conseillers techniques, toujours en lien avec les retours formulés par les acteurs de terrain. Dans le souci de qualifier et de revaloriser le métier des assistantes maternelles et d’accompagner une cohérence entre les RAM et les LAEP, tout en préservant leur adaptation au contexte local, la CAF s’est engagée à soutenir les demandes de formation continue. Enfance et Musique a été sollicitée pour encadrer plusieurs sessions.
Comment peut-on réfléchir aux propositions de formation pour un territoire aussi
diversifié que le Val d’Oise ?
Annie Avenel : Toute réflexion n’est possible que si elle est partagée avec les acteurs du territoire. Nous avons donc travaillé avec les conseillers techniques de la CAF pour évaluer les besoins en fonction des situations d’accueil. La demande était de fournir des outils concrets et des éléments de réflexion pour les animateurs de RAM d’une part, et les professionnels et les bénévoles qui reçoivent les familles dans les lieux d’accueil enfants/parents d’autre part. Diverses questions se sont alors posées. Quel est le rôle de l’animatrice de relais dans la professionnalisation des assistantes maternelles ? Que peut-on apporter aux personnes qui animent les LAEP ? Quelle est la place de l’éveil culturel du jeune enfant dans une fonction d’accueil ?
Le RAM est un référent de labellisation pour les parents mais il peut concerner jusqu’à deux cents assistantes maternelles… libres de venir ou pas. Comment soutenir leur qualification en prenant en compte cette réalité ? Certaines animatrices de réseau sont déjà engagées dans des projets d’éveil artistique et culturel pour la création de parcours sonores, de spectacles… Pour d’autres, il y a un lien régulier avec la bibliothèque. Pour d’autres encore, tout est à construire. Certains RAM ou LAEP sont dans de petits villages isolés ou dans des agglomérations importantes, parfois très pauvres, parfois aisées… Des associations comme Artefact interviennent déjà dans le département.
Nous avons partagé un état des lieux afin de concevoir des réponses « sur mesure » qui correspondent aux situations. Nous avons ensuite proposé de donner aux participants des outils d’animation pour soutenir une démarche de professionnalisation. L’objectif était donc d’acquérir une technique pédagogique et des outils concrets pour s’adresser à un groupe d’adultes et de nourrir la transmission de contenus artistiques.
La question majeure est-elle la place de l’éveil artistique et culturel dans une pratique
quotidienne des professionnels de l’accueil ?
A.A. : Au début de chaque formation s’est posée la question de la mise en œuvre des ressources personnelles. Nous avons souhaité faire émerger une prise de conscience partant de là où en était chaque participant, ceci a ensuite permis, pour l’animatrice de RAM d’imaginer comment faire à partir des ressources des assistantes maternelles. Une animatrice de réseau peut faire passer des messages et développer une stratégie. L’idée est de ne pas faire faire aux enfants dans une énergie de production mais de les aider à faire seuls et de mettre à disposition des propositions de qualité. Souvent sont évoquées des situations où par exemple l’adulte « aide » l’enfant à finir un dessin pour le donner à ses parents.
La particulatité des fonctions d’animatrices de réseau réside dans le fait qu’elles n’ont pas d’autorité hiérarchique, elles ont une expertise sans pouvoir toujours l’exercer pleinement. Ce métier manque de cadrage et les missions confiées peuvent être très variables selon les collectivités territoriales. Les assistantes maternelles peuvent être parfois dans une attitude de « consommatrice ». Alors comment faire autrement ? La question est de former des animatrices de réseau qui pourront transmettre ensuite aux assistantes maternelles dans une logique d’accompagnement, de prise en compte de la culture de l’autre. Les outils sont des propositions dont chaque professionnel peut s’emparer pour une mise en œuvre personnelle, en fonction de son savoir-faire de prédilection, du temps qu’il peut y accorder, du contexte de travail. Nous avons eu la volonté de rendre possible l’interprétation personnelle et les échanges.
Quels contenus avez-vous mis en œuvre pour favoriser les prises de conscience et donner des outils ?
Geneviève Schneider : La pratique artistique peut permettre de dépasser une difficulté voire un traumatisme. Un film comme Mon petit frère de la lune1 explicite cette démarche ; la mise en jeu est une réponse très forte également. Un atelier de percussions corporelles aboutissant à une improvisation vocale libère l’expression personnelle du stagiaire et lui donne le désir de réinvestir cette pratique sur le terrain. Il n’écoute plus de la même manière les vocalises des bébés par exemple. L’important est que les participants s’exercent à jouer d’abord pour eux-mêmes pour ensuite transmettre et partager cette dynamique.
Nous avons développé des pratiques variées dans les sessions de formation : partir d’une vidéo qui témoigne d’une situation de transmission, mettre en œuvre des ateliers, apprendre une chanson aux autres… Cet exemple est particulièrement intéressant. Je leur demandais la veille de préparer une chanson à apprendre au groupe pour expérimenter la situation concrète de chanter devant les autres mais aussi pour travailler les modalités d’apprentissage de cette chanson avec les autres. Le plaisir que les autres prennent à chanter dans cette situation, parfois pour la première fois, est palpable… Lorsque la peur d’être en face du groupe est dépassée, on prend plaisir à chanter pour soi, pour les autres, avec eux…
Comment faire le lien avec la pratique professionnelle de tous les jours, réinvestir seul et transmettre?
G.S. : L’apprentissage d’une chanson et sa présentation aux autres est directement transposable sur le terrain. Mais il n’y a pas que des choses nouvelles. J’ai souvent rencontré des stagiaires qui redécouvraient les ressources dont elles étaient porteuses. À la question : « quelle est la place de la culture dans notre vie » ? J’ai reçu des réponses d’une grande richesse. C’est en effet une manière de se révéler à soi même. L’une des participantes (passionnée de poésie) m’a apporté un poème ; en fait depuis neuf ans, elle ne s’était pas posée la question d’investir ses poésies dans son quotidien professionnel. Il y avait un clivage entre une pratique artistique personnelle et un métier. Dans le bilan, nous posons la question de la transmission de ces deux journées de formation en termes de contenus artistiques et de techniques d’animation. Il faut envisager un stage de formation comme une étape, une prise de conscience de ses propres capacités. « Oui, je peux chanter… »
Parfois c’est la transformation d’une situation de groupe qui émerge : dans un premier temps les assistantes maternelles bavardent entre elles pendant que l’animatrice s’occupe des enfants. Comment les rendre actives sans les contraindre ? Il n’est pas question de nier le besoin de parole mais d’élaborer une progression pédagogique qui libère la parole pour ensuite être à l’écoute des enfants. Reconnaître le besoin de parole des assistantes maternelles, c’est assumer leur sentiment d’isolement, lié à leur contexte professionnel. La formation permet de baliser ce temps et de créer un espace dont elles ont besoin pour se consacrer ensuite à l’espace des enfants, réellement investi ensemble.
Donner des outils à chacune, c’est à la fois partir d’un quotidien qui quelquefois n’est pas toujours simple pour le nourrir d’une dimension culturelle qui l’enrichit.
H.K. ν
1 – Expliquer l’autisme : Livre CD, par Frédéric Philibert aux Éditions D’un Monde à l’Autre, 2011.
Formations dans le Val-d’Oise
Place des animatrices de RAM dans la professionnalisation des assistantes maternelles pour le champ de l’éveil
culturel et artistique du jeune enfant
6 sessions / 12 journées
Formations réalisées à Franconville /Taverny
Ecouen / Luzarches
Pontoise / Cergy
Intervenantes : Annie Avenel / Geneviève Schneider, Enfance et Musique
Conseillère technique, référent de la CAF : Marie-Cécile Simon
Les chansons dans les lieux d’accueil enfants / parents
4 sessions / 8 journées
Formations réalisées à Eaubonne
Intervenante : Margotte Fricoteaux, Enfance et Musique
Conseillère technique, référent de la CAF : Françoise Neyrolles
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Enfance et Musique
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